GLOBAL EVENTS FOR FASHION PROFESSIONALS​

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Retour sur la conférence « S’engager ensemble pour une chaîne de production transparente »

Pour cette table ronde des Rencontres du Made in France consacrée à la transparence de la chaîne de production, Pascal Gautrand, Expert Filières mode et textile et fondateur de Mode in Town reçoit Sylvie Chailloux, Fondatrice de Textile du Maine et Présidente de l’UFIHM, Yoann Le Creurer, Directeur créatif image et communication de Chevignon ; Daniela Ott, Secrétaire générale d’Aura Blockchain Consortium et Philippe Schiesser, Expert en éco-conception, Directeur et Fondateur d’Ecoeff Lab.

Gilles Lasbordes, Directeur Général de Première Vision a évoqué lors de son propos introductif sa joie de pouvoir recevoir physiquement tous les exposants dans cet espace du Carreau du Temple pour de vrais échanges engagés autour du Made in France, à l’occasion des rencontres organisées en collaboration avec l’IFM. Il a rappelé le thème du collaboratif, “cet état d’esprit qui, au moment de la crise a permis de trouver des solutions, développer de nouveaux business, provoquer des rencontres. Ce sont les valeurs de Première Vision.”

La traçabilité outil de réinvention

Pascal Gautrand le rappelle, ce collaboratif est au sein des pratiques de la filière textile, mais depuis l’an dernier, il y a une accélération dans la prise de conscience. Les industries textile et de la mode sont pointées du doigt ces dernières années pour leur impact écologique et social sur la planète. Cela conduit à se réinventer. En parallèle, les chiffres pour la fabrication locale sont plébiscités. Donc comment se réinventer? Quels sont les outils à disposition pour ce faire ? Longtemps la question de la transparence se réglait facilement du fait des ancrages territoriaux: on choisissait une jolie étoffe de soie tissée dans le pays lyonnais, une magnifique dentelle de Calais. Aujourd’hui qu’est-ce-que la transparence?

Un impératif pour les consommateurs

Philippe Schiesser rappelle que ce mouvement de recherche de transparence remonte tout de même à 25 ans avec les essais de calcul d’impact des produits et les bilans comptables des produits de l’amont jusqu’au recyclage. En s’assurant notamment que la matière première vient vraiment du fournisseur, avec parfois des sous-traitants compliqués à tracer. Au fil des crises, l’opacité est devenue de plus en plus insupportable. Le mois d’août dernier a été particulièrement insupportable en termes d’urgence climatique. Le fait de boycotter des marques entre peu à peu dans la culture de consommation des Français. Cela modifie la valeur de la marque qui ne se juge plus par la publicité uniquement mais par les actions concrètes de RSE par exemple.

Nouveaux outils de traçabilité

Des outils nouveaux ont été créés au service de cette transparence. Au niveau du luxe, Aura Blockchain, consortium basé en Suisse a été mis en place dans ce sens. Ce nouveau projet a été impulsé par les grandes Maisons de luxe (LVMH, Prada, Richemont) qui souhaitaient se doter d’un outil facile d’utilisation pour partager les informations de sourcing avec toute la filière, et pour ne parler des peaux rares, du crocodile à la ferme d’élevage. Le travail est organisé par comités, par filières, le but étant vraiment de compiler les informations sur tous les intervenants depuis les achats de matières jusqu’à la vente finale. Du côté du Groupement de la Fabrication Française (GFF), un projet de label se met en place parmi les fabricants pour délivrer des informations fiables aux clients. “Nous sommes partis de nos pratiques, explique Sylvie Chailloux, pour voir comment on pouvait les améliorer. Nos clients pourront ainsi identifier les ateliers français qui en plus font des efforts en termes d’éco-responsabilité”.

C’est, comme l’explique Philippe Schiesser qui accompagne la création de ce label, un gage de compétitivité pour la France et de transparence par rapport au cahier des charges des donneurs d’ordre, comme des contrôleurs sociaux. “Nous sommes partis des textes existants, notamment ISO26000 qui s’adapte facilement aux rebonds de l’actualité et aux nouvelles exigences. On a intégré la question du bien-être au travail. A partir de là, l’intérêt est de faire vivre ce texte avec des actions concrètes: passage d’ateliers en énergie renouvelable, gestion de la question des stocks dormants…”. En termes de calendrier, une date fixe une échéance: l’obligation en 2023 de faire de l’affichage environnemental. Certaines marques ont retourné l’équation en intégrant l’éco-responsabilité dans leurs leurs procédés de fabrication. “90% de nos collections sont éco-conçues, se félicite Yoann Le Creurer, Directeur créatif image et communication de Chevignon, mais c’est moins pour répondre à une demande du consommateur qu’à une urgence pour la planète.” Rappelant que l’article autrefois produit en France ne l’est plus aujourd’hui, il en profite pour rappeler que la jeunesse sensible à l’environnement est aussi encore très influencée par l’image, les stars et les réseaux sociaux.  

Quelle est la méthode pour faire travailler des acteurs concurrents?

Sylvie Chailloux explique que certes les acteurs sont concurrents mais qu’ils font le même métier et ont compris qu’ils gagneraient du temps en partageant leurs expériences sur les difficultés qu’ils rencontraient, les solutions…C’est une petite corporation: 10000 personnes travaillent à la fabrication de vêtements en France. “Si nous sommes résistants et résilients aujourd’hui, c’est aussi parce que nous avons souffert ensemble” souligne-t-elle.

Sur la question de l’affichage environnemental, l’UFIHM a demandé de pouvoir retravailler la copie de la première mouture qui n’était pas assez transparente quant au produit. Nous aimerions pouvoir proposer un calendrier fiable sur 5 ans qui pourrait s’appliquer à toutes les marques de prêt-à-porter, y compris les petites structures. Évoluer selon un calendrier progressif vers plus de transparence ou faire comme Chevignon en ne retenant que les fournisseurs éco-responsables à 100% : tous les chemins sont ouverts. La plus grande difficulté étant, comme le souligne une intervenante de la marque Balzac Paris, d’être certain à 100% de tous les fournisseurs de la chaîne, jusqu’à la matière première. “Nous avons parfois encore du mal à remonter au champ de coton ou à l’élevage” insiste la responsable de Balzac Paris. “On n’y arrivera pas sans forcer quelques portes”.  La volonté en tout cas est là.

Retrouvez l’intégralité de la conférence en podcast >

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